Voyage voyage

Après une heure de route, nous arrivons au point de départ de notre trek. Nous y retrouvons La Teu (orthographe non garantie) qui sera notre guide local. C'est un Akha.

L'ethnie Akha compte environ 60 000 personnes au Laos, installées dans le nord du pays le long de la frontière chinoise. C'est un peuple qui a migré au fil du temps, depuis le Tibet en passant par la Birmanie et le Yunnan. Ils sont animistes, vivent essentiellement d'agriculture et pratiquent aussi le filage du coton.

Côté pratique : nous parlons français ; Vi parle le français et le lao ; La Teu parle le lao et le Akha. Donc pour poser une question à un Akha, c'est un jeu à trois coups dans les deux sens : français à lao, lao à Akha, Akha à Akha, et retour ...

Le départ du trek se fait en fanfare par une côte bien raide qui nous amène au Vat Xieng Teung où vivent deux moines. Nous échangeons quelques mots avec l'un d'entre eux avant de repartir. Et de nous rendre compte que la côte qui menait au Vat n'était que l'apéritif d'un grand festin !!! Longue montée, plutôt raide. La Teu s'avère quelqu'un de très attentif qui s'assure que tout se passe bien et donne un coup de main quand il le faut ; il nous fait également découvrir les richesses de la forêt. Il a aussi l'art de se débarrasser des sangsues avec une petite feuille d'arbuste ; car sangsues il y a ! Vi nous avait d'ailleurs fourni un produit répulsif avant le départ, mais modérément efficace ; et ces petites bestioles sont terriblement "accrocheuses". Le soir venu, je constaterai que l'une d'entre elles a réussi à me pomper le sang à travers ma chaussette de rando.

Nous poursuivons notre chemin et bientôt nous entendons le doux bruit d'une cascade. Un crochet : la descente est là. En bas, la cascade. Au pied de la cascade, le restaurant dix étoiles. Un homme et une femme Akha sont là, venus à notre rencontre avec le repas du midi ; comprendre les gamelles pour la cuisson et les ingrédients crus. Pour la gazinière, le bois de la forêt fera l'affaire ; la table, ce seront les rochers, quant à la nappe les feuilles de bananier seront parfaites. Elle est pas belle la vie ?

Il faut ensuite repartir et remonter ce que nous avons descendu. Encore une montée bien raide puis nous amorçons une descente. Nous commençons à rencontrer des femmes et des enfants bien chargés qui reviennent des travaux des champs ; le village n'est pas loin.

Ce soir, nous sommes hébergés dans le village dont La Teu est le chef. Notre "home sweet home" est une maison traditionnelle Akha, semblable à toutes les autres. Petit luxe : un wc (mais oui !) et une douche (encore oui !) ; pour la douche, soyons clair, c'est du local : un grand bac rempli d'eau et la casserole pour s'arroser.

C'est un dépaysement total. Le village "fait pauvre", d'un autre temps. On imagine sans peine que la vie doit y être dure : travaux des champs, récolte de produits dans la forêt revendus "trois francs six sous" à des colporteurs ambulants. Tout le monde est mis à contribution : hommes, femmes, et même les enfants qui manient la machette comme je me sers d'un canif. Pour les adultes, nous paraissons transparents ; les enfants, en revanche, sont semblables à tous les enfants du monde : la curiosité est la plus forte.

Le soir, dîner dans notre "palace" puisque c'est à l'intérieur qu'est disposé le foyer sur lequel cuisent les aliments. Le repas a été préparé par La Teu et sa sœur Se Seu (orthographe pas plus garantie) qui ont revêtu les habits traditionnels. Riz (gluant et normal), feuilles de choux cuites dans un bouillon, un peu de viande, le tout arrosé de bière locale et de force lao lao. Dehors, sur la terrasse de la maison, les enfants se sont rassemblés pour nous présenter ce qu'ils savent faire : des chants, des danses ; il m'a même semblé reconnaître "Frère Jacques". Après le repas partagé avec La Teu, Se Seu et quelques autres personnes du village, ces derniers ont entonné des chants traditionnels autour du foyer ; ce n'était pas un récital, ils étaient "entre eux", dans leur monde.